Marine Colli, consultante indépendante spécialisée en politiques agricoles et commerce international, éclaire la situation complexe de la France au sujet de l'accord entre l'UE et le Mercosur. Alors que la Commission européenne a refusé la demande française de reporter le vote, la question demeure : quelle influence la France a-t-elle sur ce dossier ?
Selon Colli, la position de la France est en réalité nuancée. Elle suggère que le gouvernement français n’a peut-être pas l’intention de bloquer l’accord en permanence. Les retournements de position d’Emmanuel Macron signalent un manque d’opposition véritable et durable. Si la France avait souhaité contrecarrer l’accord, elle aurait pu exploiter plusieurs leviers. Par exemple, elle aurait pu demander à la Commission de scinder l’accord pour en conserver un droit de veto au niveau européen. Néanmoins, l’approche choisie semble plutôt axée sur l'obtention de garanties accompagnant l'accord.
Pour Colli, l’enjeu majeur réside dans la gestion du mécontentement agricole interne. « L’objectif est de désamorcer la colère des agriculteurs », déclare-t-elle, faisant référence à une récente demande de report visant à éviter que le sujet du Mercosur ne se superpose à d’autres préoccupations agricoles, telles que la dermatose.
Les clauses de sauvegarde introduites par l’UE, qui seront examinées par les eurodéputés, sont considérées par certains experts comme des mécanismes peu efficaces. La plupart des analystes, comme l'indique un rapport de Le Parisien, affirment qu’activer ces clauses est souvent difficile et que leurs effets ne se font sentir que trop tard. De même, le renforcement des contrôles sur les imports ne garantit pas que les normes sanitaires sont respectées. Ainsi, les éleveurs brésiliens pourraient simplement ajuster leurs pratiques pour passer les tests sans que cela ne change la situation de la concurrence.
Les manifestations agricoles : un véritable impact ?
Une importante manifestation d’agriculteurs est prévue à Bruxelles, mais l’efficacité d’une telle mobilisation reste discutable. Cela fait 25 ans que l'accord est en discussion, et la Commission européenne ainsi que des pays comme l'Allemagne et l'Espagne pourraient choisir de ne pas céder face à la pression agricole. Les experts de France Info soulignent que les actions passées des agriculteurs n'ont pas toujours conduit à des reculs significatifs dans la négociation.
Au regard du vote au Conseil européen prévu prochainement, tout repose sur le prochain scrutin au Parlement européen dans le premier trimestre de 2026. Là encore, un blocage est possible, avec des pays comme la France, les Pays-Bas, l'Autriche et la Pologne, qui s'opposent vigoureusement à cet accord. Toutefois, les votes des Parlements nationaux ne pourront pas remettre en question la partie commerciale de l'accord, comme stipulé par la Commission.
En somme, la France se trouve à un carrefour stratégique, cherchant à équilibrer ses intérêts agricoles tout en gérant les implications politiques de cet accord complexe. La suite des événements dépend de sa capacité à naviguer habilement entre ces enjeux interconnectés.







