À Marigny-Marmande, au cœur de l’Indre-et-Loire, le grand marché de la truffe est en proie à des difficultés inouïes. Selon Jérôme Lespagnol, président de l’Association des trufficulteurs de Touraine, les récoltes de « Tuber melanosporum », une variété cultivée dans la région depuis le XVIIIe siècle, ont été réduites de moitié, voire davantage, à cause d’un manque d'eau crucial lors du printemps dernier.
Les trufficulteurs affichent une mine préoccupée. Jean-Marie Lhuillier, grand maître de la Templerie des Fleure-Truffes, relate qu'un producteur a ramassé en une semaine l’équivalent de ce qu’il récoltait en une journée d'habitude. « C’est vraiment une année noire », souligne-t-il, reflet de l’angoisse qui règne parmi les spécialistes.
Les clients, eux aussi, ressentent cette pénurie. Des passionnés comme Frédéric, qui cherchait à agrémenter son menu de Noël avec ce « diamant noir », se retrouvent déçus. « Tous les marchands étaient déjà dévalisés », déclare-t-il, préférant ne pas faire le déplacement pour le prochain marché, prévu le 28 décembre, dans l'espoir de ne pas « se ruiner ».
Une quête difficile pour les trufficulteurs
Les prix des truffes, naturellement affectés par la demande, oscillent désormais entre 900 et 1 200 euros le kilo. Isabelle, trufficultrice depuis plusieurs années, confie qu’elle n’a plus rien à vendre depuis le début de la saison. « Ma chienne n’a rien trouvé depuis septembre », regrette-t-elle, soulignant la dure réalité de sa situation. Heureusement, elle n’en demeure pas moins une aide-soignante, pour qui cette activité reste secondaire.
Les craintes ne concernent pas seulement la Touraine. D’autres régions, telles que le Vaucluse et le Gard, subissent également des baisses de rendement significatives. Un rapport du ministère de l'Agriculture révèle que la production nationale de truffes peine à atteindre les 50 tonnes, un chiffre dérisoire comparé aux 1 000 tonnes vendues dans les années 1900 en France. La source principale de cette tristesse est attribuée aux changements climatiques, marqués par des sécheresses de plus en plus fréquentes.
Jérôme Lespagnol exprime son scepticisme quant à un éventuel retour à une production plus abondante. « C’est dame nature qui commande », admet-il. Pour les producteurs, ces fluctuations dramatiques font écho à une réalité économique inquiétante, où chaque vente compte pour leur survie.
Les experts, tels que le climatologue Michel D. de l'INRA, avertissent que la situation pourrait s'aggraver si les tendances actuelles se poursuivent. « La diversification des cultures pourrait être une solution, mais elle nécessite du temps et des investissements », conclut-il.
