Un nouveau lexique aux enjeux considérables
Depuis l’assassinat de Mehdi Kessaci en novembre à Marseille, la France est le théâtre d'un débat renouvelé autour du trafic de drogue. Des termes comme « narchomicides », « mafia » et « mexicanisation » font désormais partie du paysage médiatique. Ces néologismes, bien que percutants, suscitent des préoccupations quant à leur impact sur la perception publique de la criminalité organisée.
Qu'est-ce qu'un narchomicide ?
La création du mot « narchomicide » par l'ancienne procureure de Marseille Dominique Laurens vise à désigner spécifiquement les homicides liés au narcobanditisme, inspiré par le terme « féminicide ». Laurens affirme que le terme « règlement de comptes » banalise un phénomène complexe qui mérite d'être abordé avec nuance. Selon Géraldine Moinard, directrice des éditions Le Robert, le terme est repris massivement par les médias, ce qui augure d'une possible inscription dans le dictionnaire.
Les vérités dérangeantes sur les mafias
À propos des « mafias marseillaises », le ministre de l'Intérieur Laurent Nuñez a évoqué ces organisations criminelles, mais comme l'indique Jean-Baptiste Perrier, criminologue, ces groupes ne répondent pas à la définition stricte d'une mafia. Contrairement à la mafia sicilienne, qui repose sur des structures secrètes et une intégration difficile, les groupes liés au trafic de drogue en France sont plus accessibles, comme le souligne l'essor des annonces de recrutement sur les réseaux sociaux.
La question de la mexicanisation
Le terme « mexicanisation » a été utilisé par l'ex-ministre de l'Intérieur Bruno Retailleau pour qualifier la situation en France. Jean-François Gayraud, commissaire général de la police nationale, tempère cette affirmation, faisant écho à la réalité tragique vécue au Mexique, où des groupes criminels mènent une politique de terreur qui a causé des milliers de morts.
Implications pour la société
Les mots que nous choisissons pour évoquer la criminalité influencent notre compréhension et notre réponse à ces enjeux. En déformant les réalités, nous risquons de créer une perception erronée des dangers et d'encourager un climat de peur. Gayraud met en garde contre l'utilisation excessive de termes chargés, qui peuvent glamouriser les trafiquants et stigmatiser les communautés concernées.
Ce langage en évolution souligne l'urgence d'un débat approfondi sur la sécurité publique et la stratégie de lutte contre le trafic de drogue en France. La question demeure : comment aborder ce fléau sans réduire ses acteurs à des caricatures ou à des clichés ? L'enjeu est de trouver un équilibre entre sensibilisation et responsabilité, afin d'éviter de tomber dans le piège de la banalisation.







