Douce et légèrement acide, la clémentine corse, véritable emblème culinaire de l'île, continue de conquérir les palais français. Fêtant cette année son centenaire, ce Petit Poucet de l'agrumiculture face à la domination espagnole a su se forger une réputation haut de gamme sur le marché local.
Originaire d'une hybridation entre les variétés de mandarine et d'orange douce, la clémentine a été mise en culture en Corse en 1925, apportant ainsi une nouvelle dimension à l'agriculture insulaire. Jean-Paul Mancel, président de l'Association pour la promotion et la défense de la clémentine de Corse (Aprodec), s'est exprimé sur l'importance de cette variété, héritée du frère Clément, un religieux français, à l'AFP.
Depuis 2007, la clémentine corse bénéficie d'une Indication Géographique Protégée (IGP), certifiant son excellence. Ce label impose un cahier des charges strict : taux de sucre élevé, équilibre entre acidité et douceur, calibres précis, et même jusqu'à 20% de peau verte pour attester de sa fraîcheur. Ces exigences sont cruciales pour sa commercialisation, malgré une production de 48.600 tonnes en 2024, dont seulement 36.000 sont vendues sous IGP.
Le volume produit apparaît modeste à l'échelle mondiale. La Chine, par exemple, a produit environ 25 millions de tonnes d'agrumes en 2021. Dans ce contexte, la clémentine corse, fort de son chiffre d'affaires de 90 millions d'euros, se bat pour sa place. Les producteurs insistent sur le fait que leurs clémentines, cueillies à la main et sans traitement post-récolte, sont d'une qualité supérieure. Le ministère de l'Agriculture souligne que ces fruits sont expédiés rapidement, garantissant leur fraîcheur sur les étals de France continentale.
Malgré son coût (5,20 euros le kilo en supermarché, presque le double des variétés espagnoles), la clémentine corse attire de plus en plus les gourmets. En effet, les chefs de cuisine, comme Romain Rotondi à Ajaccio, voient en elle un potentiel culinaire immense, allant de la sauce au dessert. Sebastian Burgos, chef au restaurant Carl's, expérimente même de nouvelles recettes comme un cheesecake revisité, intégrant cet agrume local.
Pour valoriser la récolte, notamment celle des fruits exclus de l'IGP, des unités de transformation ont vu le jour, comme l'atelier Corse Fruits et Légumes à Linguizzetta, qui en 2022 a transformé environ 3.000 tonnes de clémentines en divers produits comme des jus et huiles essentielles.
Malgré les défis de gouttes de pluie et de conditions climatiques incertaines qui menacent la production de cette année, le secteur agroalimentaire a connu une croissance notable, avec une surface plantée atteignant 1.700 hectares. Il demeure à la recherche de nouvelles opportunités, face à une Espagne en difficulté avec des récoltes en baisse.
Avec des efforts pour renforcer cette niche sur le marché, l'avenir de la clémentine corse semble prometteur, soutenu par des initiatives visant à séduire les consommateurs avec des produits innovants et haut de gamme.







